Ces derniers mois, de nombr·eux·ses artistes ont rappelé la dimension politique de l’art en prenant position sur divers enjeux : les attaques envers l’allocation du travail des arts et le droit au chômage, la baisse des pensions ou encore le génocide et la colonisation commise par l’Etat d’Israël en Palestine. Ces engagements prennent des formes multiples : musique, prises de parole ou encore manifestations. Nous avons malheureusement pu observer que ces positionnements ne sont pas sans risque : menaces de non-paiement d’une prestation, menaces concernant la suite de carrière de l’artiste, violences policières, etc. FACIR tient à rappeler son soutien à tous·tes les artistes engagé·es et dénonce toute forme de pression, d’intimidation ou de répression à leur encontre.
En septembre, sur la scène des Fêtes de Wallonie à Liège, la chanteuse Nena appelle à se révolter concernant le génocide commis par l’Etat d’Israël en Palestine et dénonce les positions de Georges-Louis Bouchez, président du MR. Les organisateur·ices auraient alors relayé auprès des artistes le mécontentement de plusieurs membres du parti, ainsi que leur demande de ne pas verser la rémunération prévue pour cette performance.
Des intimidations similaires ont eu lieu dans le cadre du Lotto Brussels Jazz Festival fin mai 2025. L’une des scènes de ce festival se tenait sur la place de la Bourse, à un horaire qui coïncidait avec les manifestations quotidiennes dénonçant le génocide perpétré par l’Etat d’Israël en Palestine. Le vendredi soir, des artistes ont invité des manifestant·es à intervenir sur scène, sans qu’aucun incident ne soit à déplorer. Alejandra Borzyk, membre du groupe Bodies, leur propose de réitérer l’invitation le lendemain. Mais tout ne se passe pas comme prévu : menaces d’annulation du concert par les organisateur·ices en cas d’invitation des manifestant·es sur scène, retrait du keffieh d’un des musiciens, interdiction de prononcer les mots Palestine et génocide. Mais également une répression violente de la part de la police qui a interpelé toute personne de la foule portant un keffieh, foulard qui symbolise la résistance du peuple palestinien face à la colonisation israélienne.
FACIR tient à rappeler fermement ses positions concernant ces deux affaires, ainsi que toutes les autres qui n’ont pas eu le même retentissement médiatique. Tout d’abord, la rémunération d’un travail est un principe fondamental et toute tentative de non-paiement d’une prestation artistique sous prétexte qu’elle n’aurait pas plu est scandaleuse. Ensuite, nous réfutons vivement l’argument selon lequel l’argent public ne devrait pas servir à diffuser des discours politiques. Les subventions artistiques ne peuvent être instrumentalisées pour museler les travailleur·euses qui en bénéficient. Tout discours est politique, et l’absence de prise de position l’est tout autant. Nous rappelons également que la liberté d’expression est une notion encadrée légalement. Il est par exemple pénalement interdit de diffamer, d’inciter à la haine ou de discriminer. Les prises de paroles et textes de chansons des artistes que nous citons respectent ces principes. Dès lors, les tentatives de censure subies par celles-ci sont des graves atteintes à la liberté d’expression garantie par l’article 19 de la Constitution belge. Enfin, FACIR condamne les agissements des organisateur·ices des Fêtes de Wallonie, des membres du MR qui les ont contactés, du Lotto Brussels Jazz Festival ainsi que de la police de la zone Bruxelles-Capitale/Ixelles pour sa gestion répressive de la situation, qui constitue une atteinte à la liberté de manifester ainsi qu’à la liberté d’expression, également garanties par la Constitution.
Mais les artistes ne s’expriment pas uniquement sur scène. Lors de la manifestation syndicale unitaire du 14 octobre 2025, plus de 140 000 personnes étaient présentes dans les rues de la capitale belge pour dénoncer les réformes de l’Arizona : attaques contre le droit au chômage, remise en question de la prise en compte du statut d’artiste dans le calcul des retraites, chasse aux personnes en situation administrative irrégulière, baisse des budgets des services publics, baisse des subventions, etc. Plusieurs milliers de personnes étaient présent·es dans le bloc culture pour dénoncer ces réformes. Néanmoins, comme dans le cas de Nena et d’Alejandra, la seule réponse des autorités politiques fut répressive. Elle a dépassé un cap sans précédent dans le cadre d’une manifestation syndicale déclarée : usage de l’autopompe, coups de matraque acharnés et aveugles, nasse illégale entravant la liberté de circuler de dizaines de personnes, usage excessif et indistinct du gaz lacrymogène. FACIR condamne cette répression et pose une question simple à nos dirigeant·es politiques : dans quels espaces les artistes peuvent-iels s’exprimer sans risquer de subir des représailles professionnelles, voire des coups de matraque ?
Il n’existe pas qu’un seul moyen d’expression pour les artistes : paroles de chansons, interventions sur scène, cartes blanches, manifestations, actions militantes, etc. Ils sont multiples et ont vocation à être activés, jusqu’à l’usure s’il le faut.
Sources:
https://www.bruxellestoday.be/belgique/intimidation-critique-Georges-Louis-Bouchez.html


